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Ça commence à ressembler à une heureuse habitude pour l’UACA. L’été arrive et un de nos athlètes s’envole pour aller disputer des Jeux olympiques. Comment, des Jeux olympiques en 2017 ?... diront les plus incrédules ou les mal informés. Oui, on confirme : en ce mois de juillet de relâche pour beaucoup vont se disputer les Deaflympics 2017, ou Jeux olympiques des sourds (« deaf » = sourd en français), organisés tous les quatre ans, la plus ancienne compétition multisports après les JO traditionnels, dont la 1ère édition s’est déroulée à Paris en 1924... tout un symbole... Et cette fois c’est Medhi Acheghane qui a validé son billet pour ces JO d’été, notre spécialiste du fond et du demi-fond que les habitués du stade Hélène-Boucher peuvent voir s’entraîner et transpirer en toutes saisons, qu’il chauffe, qu’il pleuve, qu’il neige (plus rare) ou qu’il vente. Ces 23es Deaflympics* auront lieu du 18 au 30 juillet à Samsun, en Turquie, capitale de la province de Samsun et grand port de la mer Noire.
Deux athlètes français sélectionnés, dont Medhi de l’UACA
Sur ces Deaflympics 2017 sont annoncés 4 500 sportifs de 92 pays, représentant 21 sports répartis sur 28 sites différents. La France pour sa part envoie une délégation de 45 sportifs (engagés sur 7 sports différents), sélectionnés pour cet événement mondial de l’été 2017, parmi lesquels 2 athlètes seulement : Makasidy Omar, une spécialiste du sprint et du saut en longueur licenciée dans un club de Marseille, et notre athlète Medhi de l’UACA Saint-Brieuc en Bretagne. Et comme Medhi ne veut pas faire les choses à moitié, il est engagé sur deux épreuves et pas des plus reposantes : le 10 000 m sur piste et le marathon. Medhi n’a pas froid aux yeux et pour relever son défi, il enchaîne depuis des semaines les séances spécifiques concoctées par son entraîneur des débuts et de toujours, Vincent Le Dauphin.
Arrivé en Bretagne à 12 ans, cuisinier de métier
A l’UACA, on connaît Medhi l’athlète humble et courageux, toujours prêt à se dévouer pour le club, en témoigne en mai dernier sa présence sur 1 500 m au premier tour des Interclubs, pas vraiment la distance idéale pour préparer un marathon. On en sait un peu moins sur son parcours d’homme en dehors de l’athlé. Des grands-parents originaires d’Algérie arrivés un jour en France, la ville de Toulouse où il naît en 1991, la famille qui s’installe plus tard à Niort... A 12 ans, Medhi qui est malentendant depuis sa naissance intègre une école spécialisée à Saint-Brieuc. Il sort de l’école en 2012, vit en foyer pendant quatre ans, décroche un diplôme de cuisinier polyvalent et cuisine normale, commence avec des contrats d’intérim, travaille deux ans chez McDonald’s, est actuellement agent de fabrication pour l’entreprise Daunat à Guingamp. Toute la journée debout, souvent dans le froid indispensable au conditionnement des produits, jonglant avec des horaires décalés : un coup une semaine de 5 h à 13 h, un coup une semaine de 13 h à 21 h... Pas toujours facile pour caler les entraînements. « Mais bon, je tiens le coup », assure Medhi que rien ne semble pouvoir décourager, surtout quand il s’agit de sa passion pour l’athlé et la course à pied. Et il ajoute : « Ça me plaît ici en Bretagne, j’y habite depuis mes 12 ans, c’est toute une partie de ma vie. »
Des débuts timides au club dans le groupe demi-fondMedhi est arrivé au club en 2009. Il raconte comme si c’était hier : « J’étais en internat à l’époque. Un éducateur spécialisé m’a encouragé à courir, j’ai participé à un cross UNSS en 2008, c’est là que j’ai rencontré Vincent, il m’a dit que je courais bien... Ma première saison à l’UACA a été un peu dure. Je ne connaissais personne, j’étais intimidé, mais petit à petit j’ai commencé à intégrer le groupe d’entraînement demi-fond : il y avait Matthieu Garel, Pierre Durrmann, Florent Rouaud, Gwen Tilloy, ils m’ont bien accueilli, puis sont arrivés Mehdi, Mathieu, Stefan, Cyril, Manu... Chaque année j’ai connu une progression. Mes distances préférées sur piste sont le 3 000 m et le 5 000 m, sur route le 10 km et le semi-marathon. Ce qui me plaît au club : être ensemble, l’ambiance, le collectif, la motivation entre nous, les encouragements à l’entraînement comme en course. Aujourd’hui l’UACA c’est comme ma deuxième famille. Je serai fier quand je pourrai fêter mes 10 ans de présence au club en 2019. »
Une place de 7e sur 5 000 m aux Deaflympics 2013 à Sofia
Le 30 mai dernier au stade Charléty, dans le cadre du Handisport Open Paris 2017, Medhi a été sacré vice-champion de France Handisport sur 5 000 m, comme en 2016. En toute discrétion, cela va de soi. Et comme chaque année, sa saison estivale au sortir des cross a été dense et variée : le semi-marathon de Liffré, un 10 000 m sur piste à Pacé fin avril, un 1 500 m au premier tour des Interclubs, un 3 000 m pour le deuxième tour, un 5 000 m aux Départementaux, le 5 000 m de Charléty en Handisport, un 10 km route à Pacé... Et puis le 6 juin dernier la nouvelle est tombée, par la voix de Julien Héricourt, directeur sportif Athlétisme Handisport, et de Jean-Baptiste Souche, directeur du haut niveau Athlétisme Handisport : Medhi est sélectionné en équipe de France pour les Deaflympics 2017. Pas tout à fait une première, car Medhi a honoré sa première sélection lors des Deaflympics 2013 à Sofia en Bulgarie. « Je garde de beaux souvenirs de Sofia : l’ambiance entre personnes de différents sports, la région que j’avais un peu visitée, j’allais sur d’autres sites encourager et soutenir les sportifs français... J’ai terminé 7e du 5 000 m à ces Deaflympics 2013, ça allait très vite devant, il faisait chaud, j’étais beaucoup trop stressé. En compétition, c’est psychologique, je stresse et j’ai tendance à perdre un peu mes moyens. »
Un premier marathon sous le maillot de l’équipe de France
Aux Deaflympics, Medhi ne pourra pas compter sur son appareillage auditif, c’est interdit par le règlement. « Quand je ne suis pas appareillé, les sensations ne sont pas les mêmes. Cela joue sur l’équilibre, la concentration en course, sur plein de facteurs, ça rajoute du stress. Pour me préparer en vue des Deaflympics, je m’entraîne sans appareil auditif, dans les conditions des Jeux. J’ai été fier d’apprendre ma sélection, c’est ma deuxième en équipe de France. A Sofia sur le 5 000 m, c’était ma première expérience internationale, avec un super niveau, comme chez les valides. Sur ces Deaflympics en Turquie, je m’aligne sur le 10 000 m et le marathon, avec une semaine de récupération entre les deux courses. Je travaille les allures, le mental, sur des sorties plus longues... Je n’ai jamais fait de marathon à ce jour, juste 3 semi-marathons. Ce sera le premier marathon de ma vie, et aux JO en plus pour représenter la France. C’est beau ! »
« Un travailleur acharné, doté d’une volonté hors du commun »Vincent Le Dauphin, l’entraîneur qui a appris à bien connaître Medhi au fil de ces 8 dernières saisons, ne tarit pas d’éloges sur son athlète : « Medhi est arrivé au club en cadet. Je l’ai rencontré sur un cross UNSS, puis il a été orienté vers le club par son professeur d’EPS au centre Jacques-Cartier et son éducateur au centre Vincent. Il lui a fallu tout apprendre dans un sport qu’il découvrait. Medhi est un travailleur acharné, doté d’une volonté hors du commun. C’est une personne qui positive à chaque instant sans jamais se plaindre de quoi que ce soit. Pour un entraîneur, c’est ce que l’on appelle une perle. Il est à l’écoute, toujours volontaire (parfois trop...), mais surtout il assume ses choix sans occulter ses responsabilités. Très respectueux, c’est une personne très bien éduquée. Il a toujours un mot ou un regard pour les autres athlètes du club. Souvent dans l’ombre, il mérite aujourd’hui le coup de projecteur que lui offre cette compétition à laquelle il va prendre part pour la seconde fois. Pour ceux qui douteraient du niveau réel de ces Jeux, cette précision : les athlètes du Kenya qui se sont imposés il y a quatre ans ont des records personnels sur 5 000 m aux alentours de 13’20’’... Mais cette fois, Medhi va tenter un doublé inédit : 10 000 m et marathon. Homme de défi, il va se lancer là dans une aventure très particulière. Le DTN du Handisport a décidé de lui faire confiance au regard de ses qualités d’athlètes et de son investissement sans relâche. Medhi, comme d’habitude, donnera le maximum. Personnellement, j’ai toujours eu une sensibilité particulière pour Medhi, eu égard tout d’abord à son parcours personnel, mais aussi pour ses qualités d’homme. »
« Mon cœur d’athlète est à l’UACA »
On retient ces paroles de Medhi en guise de conclusion, qui sonnent comme en écho aux propos de son entraîneur : « Ici c’est ma passion, mon cœur d’athlète est à l’UACA, je suis heureux de m’entraîner avec Vincent. C’est exceptionnel ce que j’ai vécu avec lui, il m’a poussé à me dépasser, à dépasser mes limites. Il m’a donné la fierté dans ma vie. » Chapeau et mille fois bravo à Medhi ! L’UACA peut être fier de compter un tel athlète dans ses rangs. La compétition approche à grandes foulées, on suivra de très près son double défi des Deaflympics 2017. Allez Medhi !
Medhi Acheghane athlète de l’UACA
Ses records :
- 1 500 m piste : 4’14’’06 à Saint-Cyr-sur-Loire en 2013
- 3 000 m piste : 8’46’’59 à Rennes en 2012
- 5 000 m piste : 15’27’’16 à Vannes en 2012
- 10 000 m piste : 34’28’’41 à Pacé en 2017
- 10 km route : 31’42’’ à Morlaix en 2016
- Semi-marathon : 1h11’30’’ à Liffré en 2016
Palmarès de Medhi
- 4 fois champion de France Handisport de cross, en 2009, 2010, 2013, 2014.
- 2 fois vice-champion de France Handisport de cross en 2015 et 2016.
- 5 fois vice-champion de France sur 5 000 m, la dernière fois le 30 mai dernier au stade Charléty.
* Les Deaflympics sont les Jeux olympiques réservés aux sourds, organisés par le Comité international des sports des sourds (CISS), reconnu par le CIO en 1955. Lancés en 1924 à Paris, non intégrés aux Jeux paralympiques (créés en 1960) depuis leur retrait du Comité international paralympique en 1995, ils ont été décalés sur des années impaires depuis 1931 pour les séparer des Jeux olympiques de 1932. La règle pour participer et être un athlète sélectionnable : avoir un seuil d’audition de moins de 55 décibels et ne pas disposer de dispositif de correction auditif pendant la compétition. Pour éviter toute tricherie ou simulation, des contrôles peuvent être effectués sur les athlètes, sur le même principe que les contrôles antidopage. Il existe même des Deaflympics d’hiver depuis 1949.
Un grand merci à Renaud Goude, ami cher et journaliste spécialiste de l’Athlé et du Handisport, pour son aide précieuse à la réalisation de cet article.
Les 2 épreuves de Medhi aux Deaflympics 2017 :
- 10 000 m piste : dimanche 23 juillet à 19 h 20.
- Marathon : samedi 29 juillet à 7 h 30.
Pour en savoir plus sur les Deaflympics 2017 :
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